La chambre des officiers écrit par Marc Dugain a été publié par la maison d’édition Pocket en 1998. L’histoire se passe pendant la Première Guerre mondiale 1914-1918.
Voici 4 passages qui présentent particulièrement bien la guerre pour moi:
- P29: “Une détonation part de tout près. Un sifflement d’un quart de seconde. J’ai le temps de voir une tête qui se détache d’un corps qui plie sur ses genoux, un cheval qui s’effondre. L’autre sous-lieutenant, qui était resté en selle, s’écroule de mon côté, l’épaule arrachée, l’os qui sort comme d'un jambon. Je sens comme une hache qui vient s’enfoncer sous la base de mon lit. Puis on coupe la lumière.”
- Je trouve que ce passage décrit pleinement la guerre et plus particulièrement les obus qui ici ont blessé le narrateur qui devient donc une gueule cassée. Ces obus étaient lâchés par des canons et ils explosaient en atterrissant. 70 à 80% des blessés étaient liés aux obus car ils étaient certes sonores mais pas visibles donc les victimes n’avaient pas de moyen d’y échapper. Les obus amenaient à de nombreuses décapitations, des éviscérations et des volatilisations ainsi que des blessures entraînant des gueules cassées comme dans ce roman ou des amputations.
- P88-89: “Vers la fin de 1915, on manquait d’infirmières. Marguerite s’était porté volontaire. (...) Marguerite n’avait jamais eu peur, mais elle avait beaucoup pleuré et vomi les deux premiers jours devant les membres arrachés, les gorges tranchées, les éventrations de ces soldats qu’on amenait par paquets, entassés les uns sur les autres. Le troisième jour, les remontrances acerbes du médecin-chef avaient asséché ses larmes. Le quatrième jour, un obus allemand tomba sur la grande tente où on colmatait l’hémorragie d’une jambe emportée à mi-cuisse. Elle passait les instruments qu’on ne pouvait plus nettoyer entre deux blessés.”
- Ce passage décrit la difficulté de soigner les blessés sur le front car les victimes sont nombreuses et les blessures sont graves. Les équipements ne sont malheureusement pas nombreux ainsi que les infirmiers qui sont beaucoup sollicités et mis en danger. Les anges blancs faisaient face à toute sorte de blessures; des victimes d’intoxication à cause des gaz, des victimes d’obus donc des besoins d’amputation ou encore des victimes de mitrailleuses. La guerre 14-18 a connu 21 millions de blessés donc 2% blessés deux fois. Enfin les conditions de vie difficiles qu’ils subissaient sur le front comme le manque d’hygiène ou les climats extrêmes ne le rendaient pas la tâche facile.
- P111: “L’été 1916 passa comme les précédents. J’eus l’avantage de n’être opéré qu’une seule fois. Penanster subit une nouvelle tentative de greffe osseuse qui échoua. Weil reçut deux greffes de peau. Malgré cela, je conservais l’avantage. Au nombre d’opérations que nous comptabilisons chacun sur un bout de bois, par des encoches faites au couteau, je conservais une respectable avance. J’en comptais sept. Penanster et Weil étaient à égalité avec cinq chacun.“
- Ce passage montre que les victimes de la guerre avaient de grosses blessures qui mettaient du temps à réparer. Ici, l’auteur montre que les gueules cassées subissaient beaucoup d’opérations et des tentatives de greffes osseuses qui échouaient souvent.
- P140: “Nous passions régulièrement cette soirée du samedi dans des estaminets du quartier, à descendre de longues pintes de bière et fumer des cigarettes anglaises. Penanster avait regagné son manoir breton. (...) pour l’heure, il travaillait assidûment à mettre sur pied une association à regrouper et aider les camarades qui avaient fait le sacrifice de leur apparence.”
- Dans ce passage, l’auteur décrit ce que le narrateur fait après la guerre. Il revoit ses amis de l’hôpital et il dit aussi que l’un de ses amis a lancé une association pour les blessés de guerre. C’est intéressant de voir déjà l’occupation après la guerre pour les survivants mais surtout de voir comment ces survivants s'entraident après ce massacre.
Voici 2 passages qui m’ont moins plus dans une optique historique:
- P114: “Personne mieux que mon grand-père ne connaissait les coins. Et quand on pénétrait dans la forêt, au petit matin, il s’arrêtait et, les narines dilatées, inspirez profondément : –Tiens, mon drôle, sens la terre qui fume ! Un subtil mais constant mélange de terre humide, de fougères et de feuilles de châtaigniers venait alors flatter mon odorat.”
- Ce passage décrit la vie du narrateur avant donc certes il raconte ce qu’il ne peut plus avoir car il a perdu le l’odorat. D’un point de vue historique, cette partie de l’histoire ne n’aide pas forcément même si c’est important pour saisir le nouvelle réalité quotidienne du personnage.
- P128: “L’activité semblait ne jamais cesser, le personnel s’agitait, dressait des tables, arrangeait des bouquets de fleurs. Mon oncle aimait que sa maison fût remplie et je renouais avec les déjeuners dominicaux qui débutent à midi pour s’éteindre à cinq heures, laissant les convives éparpillés à l’ombre des arbres. Certes, la nourriture n’était pas celle que nous avions connue avant guerre, mais les bouteilles de bourgogne avaient profité de ces années pour se bonifier. Ma bouche ne m’en restituait pas le goût, mais je profitais de l’ivresse et de son illusoire bien être.”
- Ici, le narrateur décrit sa rencontre avec sa famille après la guerre qui est, certes, intéressante à lire mais qui n’est pas essentielle à la compréhension de l’histoire et surtout ne nous donne pas d’information d’un point de vue historique. L’idée de départ est intéressante pour savoir comment le narrateur s’occupaient avant mais ce n’est plus la réalité quotidienne du personnage.
Cette histoire m’a beaucoup plu car elle montre que les soldats ont beaucoup souffert que cela soit au front ou même dans les hôpitaux. L’auteur décrit très bien les gueules cassées et les blessures des soldats ce qui m'a appris plein de choses sur la guerre 1914-1918. En lisant le livre, j’ai pu ressentir de la compassion pour le personnage qui nous fait vivre, psychologiquement, son calvaire et sa vie en tant que blessés.